Pour qui le fais-tu ?
Et si l’on n'avait pas besoin de toi ?
Chacun a l'air de connaître son rôle, parfois donné et parfois longtemps recherché. On nous dessine un monde où le travail court les rues, comme si ta place était là quelque part et qu'il ne tenait qu'à toi de savoir la reconnaître.
Comment nous en sommes venus à parler d'amour-propre ? Comment cette question trouve son sens ?
Où devrai-je me demander ce qui me pousse à me haïr ? Ils te jugent coupable et fainéant de ne pas honorer cette place vacante, seule place à laquelle l'on nous permet d'aspirer. Ton devoir, que tu ne sais plus accomplir, fait de toi un sujet de déception dont le désir n'est reçu que s'il supporte celui d'un autre.
Je crois qu'un enfant qu'on laisse seul ne manque pas de découvrir le monde et n'attendra pas qu'on l'y emmène. Pourquoi penses-tu que l'on devrait exiger quelque chose de toi ? S'il y a une chose qui ne soit pas évidente, c'est de communiquer, alors c'est bien la seule chose qu'on pourrait avoir à te demander.
Souvent plongé dans les dires d'un autre, dans tous ces modèles d'accomplissement, je me demande s'il existe une idée qui ne soit pas déjà pensée ?
Nous venons si tard au monde, nous le reconnaissons changé, usé, une terre dont nous sommes les êtres déchus, en quête d'un droit pour lui appartenir. Si les idées sont déjà pensées, les mélodies déjà créées et l'argent déjà distribué, qui suis-je ? N'ai-je plus la capacité de savoir ? M'aurait-on privé là aussi de ces connaissances ? Me faisant croire à mon impuissance.
Être ce "plus" au monde est le désir des corrompus, qui voyant la terre n'ont pas su la trouver la belle.
Le maître regarde ses élèves courir et lorsqu'il ôte la ligne d'arrivée, chacun se voit frustré et demande un gagnant. Imaginons que la ligne d'arrivée n'ait jamais existé, que ces dernières foulées ne soient que les premières, jusqu'où aurions-nous choisi d'aller ?
Si l'on a besoin de toi, c'est pour assouvir un désir qui n'est pas le tien.